Aux vues de la foule nombreuse venue assister à cette journée WORK Up’ sur l’avenir du travail dans nos vies, on comprend tout de suite que cette question du travail en taraude plus d’un. Étudiants, travailleurs indépendants, salariés, chefs d’entreprise, personnes en recherche d’emploi, en reconversion, chercheurs,… le rapport au travail nous concerne tous et nombreuses sont les attentes autour du travail. Bien au-delà d’une simple fiche de paie à la fin du mois, autonomie, responsabilités, créativité, reconnaissance, épanouissement et sens, sont des mots qui reviennent de plus en plus souvent.
« Seul 1 salarié sur 5 considère que le travail est “très important”, contre 60% en 1990. Et 44% des salariés veulent réduire le temps ou l’implication qu’ils consacrent à leur emploi en 2023. »
Etude Ifop
Pour cette 3ème édition de WORK Up’ co-organisé par le Rezo des Fondus et l’IUFP – Institut Universitaire de Formation Professionnelle Université Savoie Mont Blanc – c’est la question centrale de la place du travail dans nos vies et de son avenir qui a été abordée le 16 novembre à l’Impérial Palace, à Annecy. Des mois de préparation et de veille ont été nécessaires pour identifier les intervenants et les ressources disponibles afin d’éclairer les participants sur ce sujet terriblement d’actualité. Mais aussi afin d’ouvrir la réflexion, s’inspirer et s’augmenter collectivement.
Dans cette belle salle de la rotonde, avec vue sur les jardins et le lac d’Annecy, les participants ont été invités par Claire Gadroit, fondatrice du Rezo des Fondus, à se plonger dans le sujet en prenant un peu de recul. En repensant à l’enfant qu’ils étaient et à leurs aspirations lointaines.
Céline Dupont, responsable recrutement et mobilité interne au Crédit Mutuel Savoie Mont Blanc a démarré cette journée en abordant les nouvelles attentes et priorités des salariés, professionnels et étudiants entrant sur le marché du travail. Puis Aurore Dandoy, chercheuse en management, et co-autrice du livre Travailler encore ? Sciences et fictions sur le futur emploi, a lancé une réflexion ouverte sur la mutation du rapport au travail : mythe ou réalité ? Elle propose de créer de nouveaux imaginaires pour aller plus loin et repenser le travail à travers ses 4 dimensions : le temps (temps de travail, météo extérieure…), l’espace (aménagement des bureaux, lieux de travail…), l’expérience (émotions, sensations, corps, valeurs…) et l’autre (transmission, diversité, collectif, rapport à l’autorité, à la hiérarchie…).
Puis Stéphanie Gerosa, Directrice Formation Continue à l’IUFP, et riche de son expérience auprès d’une autre culture en Nouvelle-Calédonie, propose de distinguer le rapport au travail, du rapport à l’emploi. L’exploration du sujet se poursuit avec une table ronde de 3 experts, chercheurs et maîtres de conférences de l’IREGE – Institut de recherche en gestion et économie Université Savoie Mont Blanc. Ils partagent avec nous les résultats des études menées récemment.
Arnaud Bichon a d’abord abordé le sens du travail à travers 3 piliers : la compréhension de ce que je fais et de son utilité, la direction et les perspectives (est-ce que je sais où je vais?), et la cohérence avec son identité (est-ce que c’est en phase avec mes valeurs et qui je suis?). Il témoigne d’une évolution de l’identité professionnelle au cours du temps et des générations, d’une “identité sociale” vers une “identité individualisée”. Finies les carrières verticales avec un fort attachement et fidélité à une seule entreprise comme c’était le cas pour les Boomers. La Génération Z prône dorénavant un “travail ouvert”, avec des carrières extra et multi-professionnelles, qui peuvent combiner emploi avec projet entrepreneurial, et où les passions peuvent devenir rémunératrices par exemple.
Sandra Dubouloz tient à nuancer son propos en revendiquant une hétérogénéité inter-catégorielle. Et oui, il y a encore des carriéristes parmi la Gen Z ! Cette dernière déplore d’ailleurs une stigmatisation et un manque de confiance des entreprises envers cette génération ! Elle distingue 4 profils : les carriéristes donc, les équilibristes en recherche d’harmonie pro/perso, les sécuritaires en recherche de stabilité, et les relax pour qui la qualité de vie et la routine sont primordiaux.
Quand à Muriel Fadairo, elle confirme la nécessité de repenser sa vie professionnelle, se former tout au long de sa carrière devient la norme.
Les 3 intervenants sont en tout cas unanimes pour dire qu’une mutation du rapport au travail est en cours, sans pour autant prédire une rupture totale. Ils nous invitent à repenser l’entreprise autrement, plaidant pour la formation continue ou la banalisation des bifurcations au cours d’une carrière. En bonus, A. Bichon nous a donné une clé de lecture, les 4C, comme autant de façon d’envisager son rapport à l’autre, en le croisant avec la façon dont on perçoit les autres, c’est-à-dire avec confiance ou méfiance :
Puis, changement de format avec la projection du documentaire Work in Progress de Samuel Durand. Ce film met en lumière les pionniers d’une manière de travailler différente que ce soit à travers les digital nomads pouvant travailler n’importe où dans le monde, les créateurs de contenus qui arrivent à vivre de leur passion ou encore les freelances qui ont la liberté de choisir leurs projets et les gens avec qui ils travaillent. Une vraie source d’inspiration !
La 2ème partie de la journée a quant à elle abordé le travail sous l’angle de l’entreprenariat, de l’accompagnement à la création avec Margaux Bonnard d’Initiatives Grand Annecy et les témoignages de 6 entrepreneurs, qui ont osé se jeter à l’eau pour créer leur entreprise. Cette table ronde a apporté aux participants un retour d’expérience sur l’entreprenariat, l’analogie faite avec la vie de couple, loin d’être un long fleuve tranquille, entre lune de miel, questionnements, difficultés à surmonter, dont celle de garder l’euphorie et la passion des débuts sur la longueur, et le besoin de se ressourcer (ou pas d’ailleurs comme nous en a fait part Mélodie, véritable workaholic).
Plusieurs ont fait part d’une difficulté à “vendre”, que ce soit leur concept, leurs produits, ou leurs solutions : comment fixer ses prix, valoriser son unicité, assumer et défendre sa valeur ajoutée. Il ne suffit pas de bien faire, encore faut-il le faire savoir aux yeux des clients et consommateurs. Et pour ça, tous ont mentionné l’importance de savoir bien s’entourer, la force des réseaux et des personnes supports. Malgré ces parcours faits de haut et de bas, aucun ne regrette ce choix. Ensemble, ils témoignent de la grande richesse que cette aventure leur a apportée, source d’épanouissement et de nombreux apprentissages. Leurs conseils pour ceux qui hésiteraient encore : « Foncez, testez, faites et n’attendez pas que tout soit parfait. Et au pire, qu’est-ce qu’on risque ? »
Puis un vent de joyeuse créativité a soufflé dans la salle avec le témoignage de Thomas Durieux. Dessinateur industriel, il s’est créé une double identité professionnelle en cumulant cet emploi avec sa passion, la pâtisserie. Ce qui l’a amené là où il est aujourd’hui ? Une envie de mettre plus de créativité et de fantaisie dans sa vie, beaucoup de travail, du talent et un heureux concours de circonstances ! Son épanouissement, il a été le chercher par lui-même : combler un grain de folie qui lui manquait dans son quotidien professionnel en combinant ses 2 passions. Au fond, on peut s’interroger, est-ce le rôle de l‘entreprise de rendre les collaborateurs heureux, et n’est-on pas aussi tous responsable de se créer pour soi-même les conditions de son épanouissement professionnel ?
Enfin, avant la conférence de clôture, un happening, celui de Clémentine Ragot, 1er prix d’un concours d’éloquence sur le thème de l’entreprise idéale. Elle nous a partagé ce soir-là son fabuleux discours du concours : “Avez-vous déjà réfléchi à l’utilisation du mot boîte pour définir l’entreprise?”, un moment de réflexion sur sa vision de la boîte idéale.
Pour terminer cette journée riche en enseignements et en réflexion, c’était à la Génération Z de prendre la parole. Arthur Gosset, réalisateur du documentaire « Ruptures » est venu nous éclairer sur ce bouleversement qui touche les Grandes Écoles. La projection de son film, élu coup de cœur du jury au Festival International du Film Écologique et Social de Cannes à sa sortie en 2021, a fait écho auprès des participants.
Nombreux sont ceux qui ont souhaité témoigner, questionner et échanger avec Arthur Gosset. Merci à lui pour sa générosité et sa sincérité.
Tout au long de la journée, les participants ont pu aller à la rencontre des exposants présents :
Merci aux partenaires de l’événement : L’IUFP, Crédit Mutuel Savoie-Mont Blanc, Toyota, L’Esssor Savoyard-Le Messager, Les Grosses Lettres, Vincent Roux Photographe, Wizbee et Kalistène.
Et merci à Clémentine Ragot pour son enthousiasme à participer à WORK Up’ et pour ce compte-rendu qu’elle a co-écrit. Nous lui laissons le mot de la fin.
« Pour conclure, et si on arrêtait de se présenter sous le prisme de son activité professionnelle – Et toi, tu fais quoi dans la vie? – pour se focaliser sur nos centres d’intérêts en s’inspirant des canadiens – Et toi, pour quoi tu as le goût de vivre?- ”
Clémentine Ragot.
Un événement, c’est 6 mois de préparation. Merci à Vincent Roux d’avoir capturé cette journée de partage, d’échange et de convivialité. Voir la galerie photos.
Rendez-vous pour le prochain événement, mardi 30 janvier avec Le RDV de l’Habitat “Désir de ville: le retour à l’urbain ?” à La Croix des Champs à Veyrier-du-Lac.
Lire les témoignages sur la page LinkedIN Rezo des Fondus – Compte rendu d’Aurélie Filliger
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